Ma randonnée avec un guide dans la baie du Mont Saint-Michel

Randonner dans la baie du Mont Saint-Michel, c'est vivre un moment exceptionnel au milieu d'un paysage sublime. D'un côté des étendues de sable à perte de vue, de l'autre un point de repère unique, celui du Mont que tant de pèlerins au Moyen Age voyait comme un lieu sacré dont notre époque a quasiment perdu le sens. Alors, si la visite du Mont est un incontournable, il serait dommage de ne pas profiter des visites guidées qui sont organisées quotidiennement dans la baie, pour la découvrir autrement que depuis une tour des remparts ou bien de la terrasse de l'abbaye.

Les randonnées dans la baie

Il existe une offre importante de randos avec guide professionnel attesté par la préfecture au départ du Mont. Personnellement, mon choix s'est porté sur celle qui durait 3 heures. Au final, elle s'est prolongée de près d'une heure de plus !

Au départ du Mont, c'est direction rocher de Tombelaine situé à 3 km avec traversée du chenal de la Sélune et de la Sée. Puis, on revient en effectuant un grand détour qui permet d'apprécier l'immensité de la baie et de ses bancs de sable qui s'étendent à l'infini entre la Pointe de Champeaux (Normandie) et celle de Cancale (Bretagne). 

Durant l'excursion, le guide prendra le temps de vous donner un maximum d’explications sur la baie : de sa formation géologique, de son ensablement et des tentatives pour l'enrayer, du phénomène des marées, de la faune qu'on peut y voir, de la flore qu'on peut y trouver, de l'histoire de l'abbaye du Mont Saint-Michel, de l'importance du pèlerinage au Moyen Age et, bien sûr, des sables mouvants avec démonstration à l'appui. 

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Rappel : si vous voulez découvrir la baie à pied, ne vous y aventurez surtout pas seul car c'est un endroit dangereux en raison de la présence de sables mouvants et de la marée qui remonte vite.

Ci-dessous, mon article est organisé comme la balade dans la baie. Entre les périodes de marche illustrées par des photos, il y a les haltes lors desquelles des explications sont données sur la baie.

Présentation de la baie

Elle s'est formée il y a environ 9 000 ans car, auparavant, le niveau des océans était beaucoup plus bas et la Manche n'existait pas. Il faisait froid (glaciation de Würm) et lorsque la température a commencé à s'élever, elle a entraîné la fonte des glaces et la mer a fini par envahir ce qui est devenue la baie, encercler le rocher du Mont Tombe et pénétrer jusqu’à 10 km plus loin dans les terres (marais actuels de Dol de Bretagne).  

De nos jours, la surface occupée par la mer (estran*) est de 250 km². Tous les jours, elle se retire sur plusieurs kilomètres (15 km lors des plus fortes marées). Le marnage* peut atteindre 15 m mais il y a encore plus important dans un autre coin du monde qui est la baie de Fundy au Canada (16 m). 

Trois rivières se jettent dans la baie : la Sélune, la Sée et le Couesnon. 

* Estran : c'est la zone de marnage.

* Marnage : c'est la différence de hauteur d'eau entre la haute et la basse mer.

Les marées du Mont Saint-Michel

Il faut d'abord rappeler que le phénomène des marées est du à l’attraction causée par la lune mais aussi par le soleil. Ainsi, les marées aux grands coefficients (vives eaux) correspondent à un alignement du soleil et de la lune sur le même axe qui accentue les forces d'attraction puisqu'elles s'ajoutent, alors que celles aux petits coefficients (mortes-eaux) sont la résultante d'un angle droit formé par le soleil, la terre et la lune qui affaiblit les forces d'attraction. De plus, comme la lune tourne autour de la terre, sa position évoluant chaque jour de 13 degrés, cela explique que l'horaire des marées est décalée de près d'une heure toutes les 24 heures.

Pour voir l'eau arriver au pied du Mont Saint-Michel, il faut que le coefficient dépasse 90 et pour qu'elle se transforme en île, il faut qu'il dépasse 110.

On dit que la mer se déplace à la vitesse d'un cheval au galop mais il s'agit d'une expression exagérée puisque, lors des plus grandes marées, la mer se retire à une distance maximale de 13 à 15 km et, donc, quand elle remonte elle ne peut pas dépasser les 3 à 4 km/h .....

Le mascaret est un phénomène observable dès que le coefficient des marées dépasse 80 et, plus ce dernier est élevé, plus c'est spectaculaire. Il s'agit d'une vague de plusieurs centimètres de hauteur qui remonte les rivières côtières qui se jettent dans la baie du Mont Saint-Michel. Un des meilleurs points d'observation est la tour Nord du Mont mais, attention, il peut y avoir beaucoup de monde. Il faut prévoir d'y être environ 1h30 avant la haute mer.

L’îlot de Tombelaine

Situé à 3 km du Mont, il s'étend sur 3,8 hectares avec un point culminant à 45 m au dessus du niveau de la mer (pic de la Folie).

De nos jours, son accès est règlementé car c'est devenu une réserve ornithologique. D'ailleurs, quand on la voit qui apparait dans son état sauvage, on a du mal à imaginer qu'il a été habité.

Un peu d'histoire :

Les pèlerins qui se rendaient au Mont passaient par Tombelaine.

1137 : construction d'un prieuré.

1220 : des fortifications sont élevées.

1419 : les Anglais l'occupent et construisent une forteresse dont le donjon de 12 m de hauteur prend appui sur la pointe de la Folie. Leur but est de prendre le Mont Saint-Michel.

1450 : fin de l'occupation anglaise après la victoire française de Formigny qui permet de récupérer la Normandie.

1562 : dans le cadre des guerres de religion, le comte de Montgomery à la tête de troupes protestantes s’empare de Tombelaine.

1592 : Tombelaine revient dans le domaine royal

Nicolas Fouquet est le dernier propriétaire de l'îlot, car après son arrestation en 1661 sur les ordres de Louis XIV, la forteresse est détruite en 1666. 

L'ensablement de la baie

Le flot de la marée montante apporte toujours une quantité de sédiments plus importante que ce que la marée basse peut remmener vers le large. Ainsi, au fur et à mesure, ces derniers s'accumulent, forment la tangue* et sont peu à peu de moins en moins recouvert par la mer. C'est ce qu'on appelle les herbus où paissent les moutons des prés salés.

Pour éviter que le Mont ne soit plus du tout une île, un barrage a donc été construit en 2009 sur le Couesnon pour lâcher d'énormes masses d'eau à certains moment de la journée pour chasser au large un maximum de sédiments. C'est plutôt réussi pour le Mont Saint-Michel. Néanmoins, ce qui n'a pas été prévu, c'est que les rivières de la Sée et de la Sélune ont changé de cours en se rapprochant du Mont ce qui a pour conséquence d’accélérer l'ensablement des côtes du nord de la baie entre Genets, le Grouin et Tombelaine .... 

*Tangue = mélange de sable, de morceaux de coquillage et d'argile

Le pèlerinage au Moyen Age

Les pèlerins venaient aussi bien de France que des pays voisins mais, avant d'atteindre leur but, ils devaient traverser la baie et celle-ci pouvait s'avérer très dangereuse à cause de la marée et de la présence des sables mouvants. Ils arrivaient par le côté nord et non par le sud comme aujourd'hui car, d'une part, la mer s'avançait bien plus profondément dans les terres et, d'autre part, le lit du Couesnon se déplaçait sans arrêt. Il faut aussi imaginer que la plupart d'entre eux n'avait jamais vu la mer. Dès lors, le passage pour accéder au Mont pouvait être comparé à celui de la Mer Rouge par les Hébreux pour atteindre la Terre promise (épisode biblique). On ne connait pas le nombre de pèlerins qui sont morts dans la baie mais il est certain qu'ils furent malheureusement nombreux. Certains pensaient que c'était le diable (Lucifer) qui voulaient entraîner vers les profondeurs ceux qui avaient une âme impure. C'est d'ailleurs pourquoi le Mont s'appela longtemps Saint-Michel au Péril de la mer.

C'était un des pèlerinages les plus importants de la chrétienté avec Rome, Jérusalem puis, plus tard, Saint-Jacques de Compostelle. Pèleriner, c'était s'engager sur le "chemin du Paradis". On venait par milliers prier Saint-Michel, le plus important des anges, l'archange, celui qui a victorieusement combattu contre le mal. On l'invoquait pour soulager son âme, pour lui demander de l'aide, pour guérir d'une maladie mais aussi  pour favoriser son entrée au Paradis car, dans la tradition chrétienne, c'est lui qui participe à la pesée des âmes des morts.  

Les sables mouvants

Que serait la balade sans le moment consacré aux fameux sables mouvants. Ceux qui font la terrible réputation de la baie. Mais où sont-ils donc ? On marche depuis un moment déjà et le guide nous a parlé de tout sauf .... du principal. Puis, soudain, voici qu'il s'arrête, désigne une surface, s'avance dessus et se met brusquement à s'enfoncer. Ca y est, le moment tant attendu est arrivé ! L'adrénaline monte. Pourtant, on sait tous qu'il va s'en sortir, mais, quand même, le silence s'installe comme si l'inquiétude gagnait chacun d'entre nous, car, tout de même, ces sables mouvants font peur parce qu'on sait tous qu'ils ont englouti beaucoup d'hommes depuis des siècles. C'est alors que le guide nous explique que ce ne sont pas les sables mouvants qui tuent, mais la mer qui monte et qui noie inexorablement la personne incapable de se dégager de ce piège invisible.  Il continue en nous disant que c'est une couche de sable sous laquelle il y a plein d'eau, mais, qu'une fois qu'on s'enfonce, le sable se solidifie et nous emprisonne. C'est alors qu'il nous montre comment s'en sortir. Ca parait si simple ! Il remue d'abord une de ces deux jambes pour faire venir de l'eau et la dégager en s'appuyant sur ses mains, puis il s'agenouille pour refaire la même chose avec l'autre jambe et, pour finir, il prend appui sur le genou posé au sol pour s'extirper entièrement du trou. Et voilà, le guide est debout, hors de danger et sourit, content de son effet sur son auditoire.

Bonne lecture

Voir mes articles de blog sur le Mont en cliquant sur les liens suivants :

Une journée au Mont Saint-Michel

Brève histoire du Mont Saint-Michel

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